Je ne partage malheureusement pas l'enthousiasme qu'est le vôtre pour ce film. Je dis malheureusement, parce que de manière générale, je suis assez client des films de Christopher Nolan. The Prestige est un vrai bon film classique, Memento un bijou de narration, et Batman Begins revigorait une franchise en sérieuse perte de vitesse (mais présentait des défauts que l'on retrouve dans TDK). Restent un Insomnia en demi-teinte, et Following (pas vu, puisqu'inédit en nos belles contrées).
Je n'ai pas grand chose à reprocher sur le fond: on est dans du film de super-héros de bonne tenue, balisé, mais avec de vrais moments de bravoure (cf la poursuite avec le camion, la scène d'intro, et, la meilleure pour moi, celle de l'explosion de l'hopital). Deux choses à pointer tout de même: la scène avec les bateaux est d'une nullité abyssale (fausse réflexion sur le bien qui sommeille en chacun de nous, et vraie accumulation de clichés), et le film légitime en quelque sorte la video-surveillance de manière insidieuse, ce qui a le don de me mettre mal à l'aise.
Dans la forme, par contre, certains choix sont callamiteux: multiples plans tournés dans le noir, rendant l'action illisible; plans en shaky cam bien trop confus lors de scènes de baston,multiplication de travellings circulaires complètement gratuits (notamment celui sur le toit, avec le Bat, Dent, et Gordon) et céphalogènes...
Certaines scènes sont pathétiquement mauvaise: celle de blue-vision, ultra-prévisible, et à l'esthétique de vulgaire jeu video; celle, dont tout le monde se contrefout, où ils doivent identifier les policiers susceptibles de tuer le blaireau qui est passé à la télé, et à cause duquel le Joker menace de faire sauter un hopital; celle, déjà mentionnée, des deux bateaux, etc...
Ajoutez à cela un humour très stallonien années 80 (la scène où le Bat manque de se blesser avec son gadget), des seconds rôles en demi-teinte (Freeman et Caine viennent cachetoner), une longueur assez éprouvante, et vous comprendrez qu'on est loin du chef d'oeuvre annoncé.
Même LE point fort du film, à savoir le Joker composé par H. Ledger, a un contrepoint négatif, et non le moindre, à savoir la relative fadeur de Christian Bale (cela me fait mal d'écrire cela car je l'adore), ce qui fait qu'au final, on se fout un peu de Batman et de ses questionnements. Ce qu'on veut, c'est voir ce cinglé de Joker mettre GC à feu et à sang, et y distiller son nihilisme.
Restent la scène de poursuite entre le camion et la batmobile, qui est dantesque; la scène de l'explosion de l'hopital (j'adore cette lumière simili-naturelle, le calme qui y reigne, ce décalage justement, entre le côté réaliste et le Joker, déguisé en infirmière, avec sa démarche sautillante, et son air réjoui à l'idée de tout faire sauter), et celle, déjà mythique, du "tour de magie" où il fait disparaître le crayon.
Ni catastrophique, ni génial, c'est pour moi juste un bon divertissement. Ce qui n'est déjà pas si mal...